Le musée Yves Saint Laurent de Marrakech a été inauguré ce samedi 14 octobre 2017 par la princesse Lalla Salma, épouse du roi Mohammed VI, très inspirée par la mode et qui ouvrit déjà en 2010 l'exposition "Yves Saint Laurent et le Maroc". Cet espace très contemporain, qui s'annonce comme l'une des grandes attractions de Marrakech, est installé juste à côté du célèbre jardin créé par le peintre orientaliste Jacques Majorelle, puis acquis par Yves Saint Laurent et son compagnon et mentor Pierre Bergé.
Conçu par les architectes du Studio KO, Karl Fournier et Olivier Marty, basés à la fois à Marrakech et à Paris, le musée dédié au grand couturier présente ses œuvres sur un espace d'exposition relativement restreint de 400 mètre carrés. L'ensemble comprend aussi un auditorium, une bibliothèque de recherche, une librairie-boutique et un café-restaurant.
La foule se presse, très dense, pour découvrir l'exposition qui montre la vie et l'oeuvre d'Yves Saint-Laurent. Il y est bizarrement interdit de prendre des photos, droits d'auteur obligent. Bizarrement, car contraire à l'esprit visant à célébrer le talent du créateur... Sans compter que, finalement, malgré l'agressivité des cerbères chargés de faire respecter cette stupide mesure, les images impossibles finissent par apparaître sur Internet...
Les premiers smokings noirs, les robes africaines, la saharienne, la célébrissime robe Mondrian s'offrent aux yeux des visiteurs dans une mise en scène brillante, basée sur la lumière et la musique. Y défilent les thèmes chers à Yves Saint Laurent : le masculin-féminin, l'Afrique, les voyages imaginaires ou les jardins extraordinaires. Selon Björn Dahlström, directeur du musée, il s’agit d’"un voyage à travers ses inspirations".
L'oeuvre de Pierre Bergé
Cette inauguration suit d'un peu plus d'un mois la disparition de Pierre Bergé, mort le 8 septembre, et de quinze jours l'ouverture du musée jumeau de Paris, au siège historique de la maison de haute couture fermée en 2002. Les deux espaces mettent en valeur les 40 ans de créations d’Yves Saint Laurent.
Bergé avait dit consacrer les dernières années de sa vie à "transformer ses souvenirs en projets". Jusqu'au bout, il a supervisé la construction de l'épuré bâtiment marrakchi, fait de briques ocre rose. Le 22 décembre dernier (photo ci-dessus), le roi Mohammed VI avait décoré Pierre Bergé du Grand Cordon du Wissam Alaouite, ce qui n'a pas manqué de crisper certains milieux traditionalistes marocains.
La révélation de la couleur
En février 1966, le couturier découvre le Maroc en compagnie de Pierre Bergé. Natif d'Oran, à l'époque de l'Algérie française, Yves Saint Laurent perçoit son arrivée sur la terre marocaine comme une seconde naissance. La cité, la médina, ses mœurs libres et ses fêtes débridées attirent alors toute une faune bohème.
Le coup de foudre que le couple éprouve pour le Royaume se matérialise par l’achat de trois maisons à Marrakech et d’une à Tanger. Le couturier y passe deux fois par an une quinzaine de jours, le temps de dessiner ses collections. A Marrakech, Saint Laurent a la révélation de la couleur. Une citation éclairante du couturier est projetée sur un des murs du musée : « Lorsque je découvris le Maroc, je compris que mon propre chromatisme était celui des zelliges, des zouacs, des djellabas et des caftans. Les audaces, qui sont depuis les miennes, je les dois à ce pays, à la violence des accords, à l'insolence des mélanges, à l'ardeur des inventions ». Les bleus de Saint Laurent resteront comme les teintes emblématiques du couturier
Pour Pierre Bergé, il était dès lors “naturel de construire au Maroc un musée consacré à l’oeuvre d’Yves Saint Laurent qui jusque dans les couleurs et les formes de ses vêtements doit tant à ce pays”.
300'000 visiteurs la première année
D'un coût annoncé de 15 millions d'euros - estimation qui paraît quelque peu gonflée - le Musée Yves Saint Laurent de Marrakech escompte attirer 300'000 visiteurs la première année. Le jardin Majorelle en a accueilli environ 800'000 l'an dernier. L'objectif du nouveau musée paraît tout à fait réalisable.
Au-delà des collections du couturier, le musée propose une exposition temporaire, avec entrée séparée. La première, noblesse oblige, est consacrée à notre cher Jacques Majorelle, dont le jardin fut racheté et sauvé au début des années 1980 par le couple Bergé-Saint Laurent.
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